lundi 9 novembre 2015

HAÏTI, DÉBÂCLE ÉCONOMIQUE ET DÉPENDANCE ACCRUE, Études basées sur un intervalle allant de 2004 à 2014



encrejournal
Extrait de : Mémoire de maitrise en Sciences Politiques, option : Politique et Développement
Étudiant/chercheur : Delcarme BOLIVARD

Université : Madison International Institute & Business School (MIIBS)/ Université Libre d’Haïti (ULH)

 

L’instabilité socio-politique et les crises institutionnelles qu’a connues Haïti au cours de événements de 2004 jusqu’au 2014 avaient redu l’économie de ce pays très vulnérable et dépendante en grande valeur de l’international. En termes de structure, l’économie d’Haïti est caractérisée par l'importance du secteur agricole. Cependant, durant les quinze dernières années, la part de ce secteur a toutefois diminué. Alors qu'elle se situait à 31,5 pour cent de la valeur ajoutée en 1997, aujourd'hui elle ne représente plus que 24,5 pour cent de cette valeur[1].

Pour mieux aborder cette situation, il nous faut la situer dans un contexte pré-tremblement de terre du 12 Janvier 2010 où 80% de la population haïtienne vivait en dessous du seuil de pauvreté avec mois de deux (2) dollars américains par jour. Les droits à l’alimentation, au travail, à la santé et à l’éducation de la population étaient chaque jour foulés au pied. L’environnement du pays s’est dégradé avec les multiples intempéries, dont : les inondations, les glissements de terrain, notamment en 2004 et en 2008 où plusieurs milliers de personnes ont perdu la vie.

Beaucoup d’indicateurs présentent la situation de pauvreté à Haïti, tels : l’insuffisance pondérale chez les enfants de moins de cinq (5), l’accessibilité aux soins de santé, la mortalité infantile et post-infantile, la mortalité maternelle, le taux de séro-posivité au VIH, etc[2]. L’ensemble de ces faibles niveaux d’indicateurs, montre que les conditions de vie de la population sont encore précaire, exemple : espérance de vie à la naissance demeure faible (54 ans) et le ratio calorique moyenne qui était estimée à 1788 calories/jour par personne avait régressé pour se situer autour de 1750 calories[3].

L’économie d’Haïti dépend en grande partie de l’aide internationale et cette dépendance ne fait que paralyser le développement de ce pays.

Une économie de subsistance marquée par des inégalités criantes

 Haïti compte parmi les pays les plus inégalitaires du continent américain et parmi les « pays à revenu faible ». Malgré une période de forte croissance dans les années 1970 liée au tourisme, l’économie haïtienne a connu un déclin. Au cours des dernières années, la croissance a été modeste, tout en maintenant une certaine stabilité macroéconomique et en contrôlant l’inflation, ce malgré un contexte international défavorable dû à la crise financière et en dépit du profond choc causé par le tremblement de terre de 2010 sur l’économie haïtienne. Selon les estimations de l’IHSI, le produit intérieur brut (PIB) a cru de 4,3 % en 2012-2013, une croissance économique principalement attribuée aux bons résultats de la production agricole, en partie liés à une saison cyclonique plus clémente et à une baisse des prix de la nourriture importée36. Le secteur contribuant le plus au PIB est le secteur des services (59 %), suivi par l’agriculture (23 %) puis par l’industrie (18 %). Entre 2012 et 2013 le secteur primaire est celui qui a le plus augmenté, soit plus 4,6 %, en termes réels, de sa valeur ajoutée[4].

La majorité de la population haïtienne vit dans la pauvreté. 60% des habitants perçoivent l’équivalent de moins de deux dollars américains par  Le taux de chômage atteint 60  à 70 %, plus de 44 % de la population souffre de malnutrition en Haïti[5].

 Le droit au logement n’est pas encore une réalité pour la majorité des Haïtiens. Cette précarité du logement s’est aggravée avec le tremblement de terre de 2010. En septembre 2013, 280 000 personnes touchées par le séisme demeuraient dans des camps de réfugiés.

Selon le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), 60 % de la population, principalement en milieu rural, n’a pas accès aux soins de santé de base[6]. Selon l’Organisation mondiale de la Santé, l’espérance de vie à la naissance en Haïti était de 63 ans en 2011[7]. Le taux de mortalité́ infantile en 2011 était de 70 pour 1 000 naissances et le taux de mortalité́ maternelle était de 350 pour 100 000 naissances vivantes. Les dépenses du Gouvernement en matière de santé par habitant ont presque doublé entre 2008 et 2010, mais ne dépassent pas les 10 % du budget de l’État. Vu la précarité des ressources économiques de la majorité de la population, il n’est pas étonnant que «la médecine traditionnelle joue un rôle important, car, elle constitue le premier recours pour près de 80 pour cent de la population en raison de son faible coût et de sa proximité́». Cette situation s’est aggravée avec l’épidémie de choléra.

D’après les Nations Unies en septembre 2013: «Au moment où le Président Michel Martelly accédait à la présidence, 76 % de la population haïtienne vivait en situation de pauvreté, 56 % dans la pauvreté extrême. Cela, dans un contexte de forte inégalité sociale»[8]. Cette inégalité a été analysée par le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) dans son rapport sur le développement humain 201312, selon lequel Haïti a l’un des plus bas indices de développement humain (IDH) au monde, avec 0,456 pour l’année 2012. Haïti se situe au 161e rang sur les 187 pays inclus. Quand cet indice est ajusté selon les inégalités affectant les plus pauvres, privés de santé, d’éducation et de dignité, l’indice descend à 0,273. Et si l’on considère l’inégalité spécifique entre les hommes et les femmes, Haïti est placé au 127e rang sur 148 pays pour l’année 2012. Pour mieux comprendre ce que signifient ces indices d’inégalité, il convient d’examiner les explications du PNUD à ce propos: L’IDH d’Haïti pour 2012, de 0,456, «est au-dessous de la moyenne de 0,466 pour le groupe des pays à faible développement humain, et encore plus au-dessous de la moyenne de 0,741 pour les pays d’Amérique latine et des Caraïbes».

Haïti a un Indice d’inégalité de genre de 0,592, qui place le pays au 127e rang parmi 148 pays pour 2012 […]. En Haïti, 4 pour cent des sièges parlementaires sont attribués aux femmes, et 22,5 pour cent de femmes adultes ont atteint un niveau d’éducation secondaire ou supérieure en comparaison avec 36,3 pour cent de leurs homologues masculins. Pour chaque 100 000 accouchements, 350 femmes meurent; et le taux de fertilité adolescente est de 41,3 naissances pour 1 000 naissances. La participation féminine au marché de travail est de 60,1 pour cent en comparaison avec 70,6 pour les hommes»[9]  

Une économie reposant sur les importations et l’aide internationale
Les importations demeurent la principale composante de l’offre du pays, cependant elles sont, incapables de répondre aux besoins alimentaires de sa population. Entre 2003 et 2005, la production nationale a compté en moyenne pour 43.09% des disponibilités alimentaires, alors que les importations alimentaires se sont maintenues à hauteur de 50.58%.

En 2012, les secteurs de l'agriculture, de la sylviculture et de la pêche représentaient 25 % du PIB, mais recevaient la plus faible part du crédit bancaire, 0,16 %2. Pour les dépenses de capital financées sur fonds locaux et exécutées dans le cadre du programme d’investissement public, 5,3 % sont allés au Ministère de l'Agriculture en 2012. Le secteur agricole qui reste - avec un poids de 99 % - le pilier du secteur primaire est très vulnérable par rapport aux aléas climatiques[10]. Ceci est non seulement dû au manque d'entretien des quelques infrastructures d'irrigation et de drainage, mais également au grand manque de ce genre d'infrastructures à travers le pays.
 
Le gouvernement mise à 100 % sur le tourisme, sur l’investissement dans la sous-traitance et dans l'agro-industrie, et sur le secteur des ressources naturelles. Ce dernier n'est pas géré de façon transparente (mines). Ces activités augmentent la dépendance du pays face à l'étranger et imposent un modèle de développement dominé par ce dernier. Ces trois secteurs ne peuvent absorber le chômage massif. La population rurale et ses activités liées aux petites exploitations agricoles reste le secteur le plus important, mais est démunie, sans des politiques publiques qui la soutiennent (crédit, services publiques, assurances,…)[11].

La transformation de fruits doit être appuyée comme filière économique. On est encore loin d’arriver à transformer l'ensemble des fruits et beaucoup pourrissent à terre alors qu'il existe une importante insécurité alimentaire. Les petits ateliers de transformation existent mais font face aux problèmes de fonds de roulement pour mener à bien ces activités.

Le tourisme est une des importantes clés pour sortir le pays du marasme économique, mais il faut qu'il intègre les communautés. Les projets de tourisme existants sont exclusifs et visent un tourisme de luxe. Concernant la sous-traitance on constate que le secteur ouvrier est marginalisé, mal payé, qu'il travaille dans des mauvaises conditions, qu'il existe d'importantes répressions syndicales dans les usines, des révocations arbitraires et des abus sexuels sur les femmes.

Donc, La libéralisation commerciale du pays à partir de l’année 1980, en exposant subitement la production nationale à la concurrence étrangère, a contribué à transformer la structure de l’économie au profit du secteur commercial et au détriment des activités productives. Depuis, la prédominance des importations, qui en 2012 représentent 48 % du PIB contre 13 % pour les exportations85, reflète une constante de l’économie haïtienne, à savoir le déficit structurel de la balance commerciale et la dépendance aux transferts externes, publics et privés, destinés à son financement[12].

Cette étude qui s’étend de 2004 à 2014 sur la question de la présence de la MINUSTAH relative aux problèmes de l’instabilité politique et de la pauvreté en Haïti, nous laisse comprendre que l’international ne peut rien apporter de sérieux dans cette situation. Au contraire, la MINUSTAH qui devrait protéger les droits de l’homme en Haïti, promouvoir le développement par la sécurité et la stabilité socio-politique, ne fait qu’empirer la situation par des actes de violation des droits de l’homme.

Nous avons constaté dans notre travail de recherche que les agences onusiennes qui prétendent capables de résoudre le problème de la pauvreté haïtienne, sont extrêmement loin de leurs visions puisqu’à 11 ans de la présence des forces onusiennes dans le pays, la population continue de patauger dans la misère et dans l’instabilité politique. Le denier rapport sur le développement humain réalisé par IDH et le PNUD, montre à claire la pauvreté du peuple haïtien en dépit de fortes sommes d’agent investi. De-là, nous comprenons que les dépenses ne sont pas effectuées en faveur du peuple haïtien. Tandis que, des organismes internationaux s’imposent sans rien offrir de sérieux et de spécial à Haïti où le système économique est en perpétuelle décadence à causes des dépenses inutiles et imaginaires.

Avec la présence de la MINUSTAH le pays continue de connaitre beaucoup de crise, telles : crises institutionnelles, crises de valeurs, crises environnementales etc. Malgré la présence des agences onusiennes, beaucoup d’enfants ne peuvent se rendre à l’école, l’agriculture en déroute, chômage et insécurité de toutes sortes, la mortalité infantile se répète au quotidien, dégradation de l’être haïtien aux yeux du haut commissariat des droits de l’homme de l’ONU et de l’IDH, l’instabilité politique fait rage, la pauvreté extrême s’identifie sur le visage de la population. Donc, nous sommes en droit de considérer la contribution de l’international dans la situation actuelle du pays sans ignorer l’incapacité de l’État haïtien de répondre positivement et favorablement aux exigences de la population haïtienne.

Ainsi, comme nous autres, le RNDDH fait le constat que voici : 

La situation du pays est catastrophique. Les droits sociaux, économiques et politiques du peuple haïtien sont bafoués. Les conditions de vie sont précaires. La pauvreté s'installe. Les services de base ne sont pas disponibles pour la population. Plus que jamais, la vie en Haïti est caractérisée par une insécurité humaine. Les milliards de dollars américains dépensés au nom du peuple haïtien (…) n'ont donné qu'un résultat mitigé. Les différentes décisions prises par les autorités ne se sont pas inscrites dans le cadre d'un programme articulé de relèvement et de reconstruction du pays. Les actions réalisées n'ont pas pris en compte les intérêts supérieurs de la Nation. Ainsi, les droits humains, les idéaux républicains et les principes démocratiques ne sont pas au rendez-vous[13].

Les actions éparses dénombrées n'ont eu comme résultats que de persuader la population en général et la diaspora haïtienne en particulier, que la situation est en train de changer et que le pays est sur les rails du développement. Aujourd'hui plus que jamais, Haïti est vulnérable à tous les points de vue. L'avenir est sombre. Les menaces de plus en plus persistantes (…)[14].

 
Chercheur: BOLIVARD Delcarme

Remerciement à Me HERODE Charnel de L'Université Libre d'Haïti www.ulh.edu.ht

et le professeur: DOUDOU Abdonel de www.jurimedia.org  


[1] . Cadre intègre, étude diagnostique sur l’intégration du commerce
[2] . Document de Stratégie Nationale pour la Croissance et la Réduction de la Pauvreté (DSNCRP) 2008-2009, Novembre 2007
[3] . Idem
[4] . Haïti, un nouveau regard, rapport de PNUD 2013
[6] . www.unicef.org/infobycountry/haiti_2014.html
[7] . www.who.int/countries/hti/fr/.
[8] . Intervention du Premier Ministre, Laurent Salvador Lamothe, à l’occasion de la soixante-huitième session ordinaire de l’Assemblée générale des Nations Unies, New York, 26 septembre 2013
[9] . PNUD, Indicateurs Internationaux de Développement Humain. Haïti. Profil de pays : Indicateurs de développement humain. Rapport 2013
[10] . http://www.brh.net/rapport_2012.pdf
[11] . Idem
[12] . Idem
[13] . RNDDH, commentaire sur le rapport: Haïti, 5 ans après le séisme du 12 Janvier 2010
[14] . Idem
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