mardi 18 décembre 2018

HAÏTI/PETROCARIBE : DILAPIDATION, REGRET, VENGEANCE. L’AFFRONT D’UN PEUPLE SANS MÉMOIRE ET LA JUSTICE BANCALE D’UNE NATION À GENOUX

Par : Delcarme BOLIVARD

Ricardo Seintefus, l’ancien représentant de l’Organisation des États Américains (OEA) à Haïti, dans l’hypothèse vérifiée de son ouvrage titré : ‘’L’échec de l’aide internationale à Haïti. Dilemmes et égarements’’, persiste et signe qu’il soit plus facile de détruire la société haïtienne par le support économique de l’international que de l’en développer. Ce postulat nous renvoie à deux (2) considérations :

L’international ne fait qu’accroître son économie en investissant faussement dans certaines réalisations du pays où la multiplication des Organisations Non Gouvernementales (ONG) installe invisiblement des ponts du retour de grands avantages aux investisseurs eux-mêmes. Tout cela par une politique d’échange économique non équilibrée fondée sur l’irrespect des normes de la coopération entre les États. Ce qui explique que l’aide internationale est toujours profitable à l’international.

Par l’aide présupposée ou supposée internationale à Haïti, dans un contexte d’ingérence sociopolitique, de nouveaux riches haïtiens s’affirment et s’affichent en marge de la loi, en agissant bon gré mal gré pour dévier la Justice constituant déjà une faiblesse par ses composantes et surtout, son parcours à travers l’histoire nationale. Et cette question fragilise le statut juridique de l’État haïtien à l’échelle internationale et hypothèque la souveraineté nationale en grande partie.

Cependant, une coopération directe ou indirecte entre Haïti et certains pays de l’international dans de très bonnes conditions, ne favorisera-t-elle pas un véritable essor au développement durable du pays ? Lequel questionnement nous invite à intensifier nos réflexions diplomatiques portées sur un rapport de ‘’Sud-Sud’’ selon que le progrès se fixera sur un dynamisme de développement durable relatif aux efforts bilatéraux. Ou un rapport de ‘’Nord-Sud’’ dans un contexte de poids sur la balance d’échange sociopolitique, économico-culturel. Ce qui amène à établir que le sens des coopérations entre les États doit être équilibré afin d’éviter toutes sortes de manipulation possible.

Haïti, dans un échange prévisible avec le Vénézuéla, porté sur un terme lointain, bénéficie d’un programme de développement durable baptisé : ‘’PetroCaribe’’ de (depuis) sous la présidence du feu René Garcia Préval en 2006 jusqu’à celle de ‘’de facto’’ mené par l’ex-sénateur de la République, Jocelerme PRIVERT en août 2016. Ce programme, fixé sous forme de vente de pétrole à un prix réduit, était remis à l'État haïtien par l'administration étatique du feu Chavez pour contribuer à la relance du développement national par la construction des écoles primaires, secondaires et universitaires, des ponts, des routes ; par l’aménagement du territoire, la restauration du système judiciaire, l’émergence du système agricole, l’établissement des réseaux électriques ; entre autres, sont les principaux axes auxquels le contenu de l’enveloppement dudit programme devrait être destiné. Et selon les derniers rapports de la Commission d’éthique et d’anti-corruption du Sénat de la République liés à ce plan de développent, rien de spécial n’est réalisé à Haïti, si non que la dilapidation massive du fonds ‘’PetroCaribe’’.
   
Dilapidation du fonds PetroCaribe

Un montant de 3.8 milliards de dollars américains (selon les rapports) est dilapidé dans le cadre du programme ‘’PetroCaribe’’ de 2006 à 2016. Aucune sphère politique nationale et aucun secteur de la société ne veulent entendre raison de s’identifier comme des indices ayant participé soit directement soit indirectement au gaspillage de ce fond. Aucun projet sérieux n’est réalisé, aucune construction importante devant relever et redresser l’image de la République à l’échelle internationale n’est effectuée. Au contraire, le fonds ‘’PetroCaribe’’ alloué à Haïti pour son développement durable est utilisé de manière incertaine par une couche sociale et a créé de nouveaux riches malhonnêtes au mépris d’un peuple vivant dans le malheur de la vie.

Dans notre première réflexion sur le rapport du fonds PetroCaribe soumis par la Commission d’éthique et d’anti-corruption du Sénat, menée par le Sénateur Évalière BEAUPLAN, nous avons envisagé les prémices des données, des analyses et commentaires de ladite commission et nous avons conclu que, quelle que soit la considération possible ou l’idéologie politique, l’objectif visé par le programme ‘’PetroCaribe’’ a été désaffecté, considérant l’état déplorable dans lequel vit le pays en plein XXIème siècle. La condition économique précaire du pays où sévissent la misère et le désespoir de la population haïtienne, mitigée des crises sociopolitiques, contribue en grande partie au phénomène migratoire tendant à dévaloriser nos compatriotes vécus difficilement sous certains pavillons internationaux.

Dans les deux (2) rapports de la Commission d’éthique et d’anti-corruption du Sénat de la République, celui de l’ancien Président du Grand corps, le Sénateur du département de l’Artibonite, Youri LATORTUE, du parti politique ‘’Ayiti An Aksyon’’ (AAA), a épinglé certains hauts fonctionnaires de l’État haïtien dans le cadre de la gestion du fonds ‘’PetroCaribe’’ allant de 2006 à 2016. Celui du Sénateur du Nord-Ouest, Évalière BEAUPLAN en a fait les mêmes constats, à un point tel, conseillait à l’Assemblée Nationale de s’y pencher afin de transmettre le dossier au pouvoir judiciaire pour une décision définitive. Pourtant, étouffé par des groupes opposants parlementaires d’horizon politique divers.

La commission spéciale chargée d’enquêter sur la gestion du fonds ‘’PetroCaribe’’ révèle que de fortes sommes ont été dilapidées par de hauts fonctionnaires de l’État, dont des Ministres, des directeurs généraux et autres. Tous ces hommes ayant été indexés par le dernier rapport, ont eu recours aux réseaux sociaux pour se dédouaner par tous les moyens possibles des accusations dudit rapport au lieu de permettre à la Justice de faire son travail.

Regret du fonds PetroCaribe (genèse)

Signée le 07 septembre 2005 avec 12 des 15 pays de la CARICOM, dont, les principaux membres originaux : Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, le Belize, Cuba, la République Dominicaine, la Dominique, la Grenade, Guyana, la Jamaïque, Nicaragua, le Suriname, Sainte-Lucie, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Vincent et les Grenadines ; l’alliance ‘’PetroCaribe’’ était un programme lancé par le Vénézuéla, axé sur la distribution de pétrole à certains pays de la Caraïbe à un prix préférentiel. Ce programme issu de l’alliance ‘’PetroCaribe’’ était destiné à contribuer au développement durable de certains pays caribéens par l’investissement dans des projets structurels et infrastructurels.

Deux pays, dont : la Barbade et Trinité-et-Tobago, n’ayant pas joui de ce programme par rapport à leur position diplomatique face au système politique d’aide internationale imposé par la présidence de Chavez d’alors. Et Haïti fut intégré l’alliance ‘’PetroCaribe’’ jusqu’après l’élection du Président René Garcia Préval en 2006.

Ayant constaté ce que réalise la République dominicaine, notre voisin le plus proche géographiquement parlant, avec le fonds ‘’PetroCaribe’’ en matière d’infrastructure routière, d’aménagement du territoire, de construction d’universités ; entre autres, soulève chez certains Haïtiens conséquents le sentiment de regret qui les pousse à se questionner sur la nécessité et l’importance de l’État haïtien face aux grands problèmes de la population.

Considérant l’ampleur de la situation chaotique déplorable dans laquelle évolue le pays, les citoyens se soulèvent en demandant des comptes à toutes celles et tous ceux ayant participé à la dilapidation du fonds ‘’PetroCaribe’’. La population estime qu’elle ne pourra pas  rembourser ce fonds du fait qu’elle n’en a pas joui et se soulève en grande pompe pour solliciter de la Justice haïtienne une intervention sérieuse afin de condamner les coupables et d’envoyer un signal clair pour empêcher qu’une situation pareille se reproduise dans le pays.

Plus d’un se questionne sur la nature du remboursement de ce fonds gaspillé par certains grands dignitaires et fonctionnaires de l’État. Les citoyennes et les citoyens haïtiens refusent de croire qu’ils vont en tout état de cause, restituer cette forte somme d’argent par leurs courages à Vénézuéla pendant les vingt cinq (25) ans à venir à un taux d’intérêt annuel de 1% après un délai de grâce de deux (2) ans sans qu’ils ne s’en soient pas servi véritablement. Ainsi, sur tous les réseaux sociaux, la question citoyenne de l’heure est ainsi formulée : ‘’Kot kòb PetwoKaribe a ? (Où est le fonds du PetroCaribe ?)

Selon les clauses du contrat ‘’PetroCaribe’’, ce programme devrait être utilisé pour des projets fructueux destinés à stimuler le développement socioéconomique du pays. Le fonds ‘’PetroCaribe’’ devrait aussi, entre autres, être un remboursé en nature avec des produits, dont : les céréales, le sucre, la banane, par Haïti, un pays dont le peuple souffre misérablement. Par ailleurs, perplexes, les citoyens d’ici et ceux de la diaspora comprenant mieux la situation, se questionnent sur le devenir du pays aux yeux de la corruption qui s’érige en maitre dans la société haïtienne.

 Vengeance populaire

Notre première considération sur la question de "vengeance populaire" nous revoie à deux hypothèses. Premièrement : Quand la Justice se tait dans la combine des corrompus, le peuple se doit donner justice par la force et la violence. Deuxièmement : Quand les élites trahissent, la société meurt (Albert Camus). Deux grandes réflexions qui nous portent à considérer logiquement et historiquement l’idée de violence imposée par le peuple haïtien dans ses démarches de Justice.

La violence a été et est toujours admise comme une arme redoutable utilisée par le peuple haïtien dans sa quête de libération, d’indépendance et surtout de Justice. Nous nous rappelons la violence imposée par les esclaves avant 1804, avec laquelle ils ont conquis la liberté et l’indépendance. Ainsi, dans la zone insulaire, Haïti s’identifie au nombre des pays où la violence s’installe tel qu’un mode de résolution des conflits populaires et des conflits entre l’État et le peuple. La violence à Haïti a été au cours des siècles, le modèle infaillible de recours consistant à résoudre les problèmes relatifs à la conservation ou à la prise du pouvoir politique et la voie par laquelle s’exprime le peuple dans le cadre des révendications.

Considérant les séries de violence qui ont eu lieu de manière systématique pendant la période des baïonnettes à Haïti (1804-1915), celles qui ont vu le jour après le départ pour l’exil du Président Jean-Claude Duvalier en 1986, et d’autres qui ont eu pour mission de bouleverser l’année 1990 marquée par le coup d’État sanglant conjugué entre la Communauté Internationale et certains membres des Forces Armées d’Haïti (FADH) du Président Jean-Bertrand Aristide ; le statut de la Violence reste pour le moment le symbolisme du peuple haïtien se livrant à la recherche du bien être collectif.

Nous soulignons à l’encre forte que la demande de reddition de compte du fonds ‘’PetroCaribe’’ dilapidé par certains grands dignitaires, fonctionnaires de l’État haïtien et ceux de la Communauté Internationale, est une source de violence qui pourra engendrer, d’une part une violence politique chez les gouvernés, et d’autre part, une crise sans précédente mâchonnée d’un réveil de conscience citoyenne. Les émeutes des six (6), sept (7) et huit (8) juillet 2018 à Haïti, notamment au niveau de Port-au-Prince, constituent une marque de violence de dernière heure chez un peuple qui réclame Justice de son sort. Delà, la population sans défense, cherche à s’identifier par la force de sa volonté de conduire les autorités vers le droit chemin du respect scrupuleux des droits de l’Homme. Et le mouvement ‘’PetroCaribeChalenge’’ déclenché par un groupe de jeunes citoyens conséquents haïtiens d’ici et d’ailleurs s’installe dans la logique du postulat d’une nouvelle forme de crise sociopolitique émaillée de violence de toutes sortes au cas où rien ne s’y fait. À cet effet, Robespierre, Avocat, Homme de loi, Homme politique, Révolutionnaire, dans ses réflexions politiques nous enseigne : ‘’Quand le gouvernement viole les droits du peuple, l'insurrection est pour le peuple le plus sacré et le plus indispensable des devoirs.

Peuple sans mémoire

Il nous faut, dans cette partie de l’article, présenter un ensemble de faits et d’évènements négligés par le peuple haïtien dans le déroulement de son histoire. Ainsi, notons qu’à mesure un peuple oublie son passé, c’est à mesure qu’il risque de ne pas pouvoir s’identifier.

Victor Hugo, essayant de comprendre le rôle que joue l’histoire dans la vie d’un peuple s’interroge comme suit : ‘’Qu’est-ce qu’un fleuve sans source ? Qu’est-ce qu’un peuple sans son passé ?’’  Marcus Garvey d’enchérir : ‘’Un peuple qui ne connaît pas son passé, ses origines et sa culture ressemble à un arbre sans racines. La mémoire d’un peuple réside dans son histoire et dans son vécu quotidien. Il est tout à fait évident de reconnaitre la valeur d’un peuple par rapport à son adhésion existentielle historique. Or, quand il arrive à ne pas s’y accrocher, cela lui permettra de ne rien prendre au sérieux du présent et s’enlise à un avenir incertain. Delà, la théorie du souvenir conçue pour sauver l’espoir du peuple se dessine sur l’orgueil des citoyens conséquents.

Dans le cas du peuple haïtien, l’idée du mépris du passé est fortement perçue. Certains grands évènements historiques sont totalement méprisés et jetés dans la poubelle de l’oubli. Prenons quelques exemples :

L’assassinat de l’Empereur Jacques Ier (Jean-Jacques Dessalines) pour sa prise de position contre la corruption et des fraudes administratives dans les institutions étatiques. C’est ce qui a occasionné ou déclenché la lutte pour le pouvoir, la scission du pays, le vol, le gaspillage et l’ouverture d’une nouvelle classe dominante (la bourgeoisie) ;
L’acceptation de payer l’indemnité de l’indépendance par le président Jean-Pierre Boyer imposée par la France. Cette manœuvre de l’impérialisme dévalisa l’économie nationale qui fut déjà fragilisée par le coût de l’histoire ;
L’occupation américaine de juillet 1915 à décembre 1934 s'inscrivit dans une logique anti-développementale et introduisit dans les annales de l’histoire de la politique haïtienne une page d’ingérence internationale sans précédente ;
La prise de pouvoir et la chute des Duvalier sur la scène sociopolitique nationale émaillées d’un contexte ‘’infratricide’’ on ne plus terrible, sans penser aux effets des lois établies.
Le gaspillage du fonds de la rubrique ‘’Coopérative’’. Ce qui a engendré une rancune intense chez le peuple haïtien face aux dirigeants ;
La dévastation du pays par le passage du séisme du 12 janvier 2010. Ce cataclysme a donné pour effets, le gaspillage des fonds collectés pour la reconstruction d’Haïti par la CIRH ;
Le massacre de St-Jean Bosco à Port-au-Prince, celui de la Syrie aux Gonaïves, sans oublier le dernier en date, celui de La Saline de l’aire Métropolitaine de Port-au-Prince, où des dizaines de personnes ont été trouvées mortes et incendiées pour des causes politiques ;
La dilapidation du fonds ‘’PetroCaribe’’ par certains acteurs politiques nationaux internationaux, crime financier transnational que le pays n’a jamais connu depuis la tentative de la fondation de l’État haïtien.

Donc, une lecture à la loupe de bien d’autres scènes macabres dans l’histoire nationale sont à envisager pour mieux comprendre la dimension faillible de la mémoire du peuple haïtien. Et pour causes, le déterminisme politique enveloppe l’esprit de la population qui s’oublie ne voulant pas se mettre à l’abri contre la dynamique de corruption infligée par une classe de la société haïtienne comme une vérité absolue.


 La justice bancale à genoux 

Tant que la Justice d’un peuple est faible, tant qu’il se patauge dans la misère infernale par la puissance de la corruption des dirigeants. La faiblesse de la Justice haïtienne à se prononcer sur certains dossiers brulants de la vie nationale, provient du mode de gouvernabilité de la nation. À Haïti, la Justice et l'utilité se trouvent divisées, ce qui est contraire à la pensée de Rousseau.

Les principaux faits saillants qui ont mis à nu la Justice haïtienne durant les vingt dernières années se dévoilent tant par les observateurs nationaux que par ceux de l’international. Entre autres, notons que la Justice haïtienne n’a rien dit sur le dossier ‘’Coopérative’’ de Jean-Bertrand Aristide, rien n’est dit sur le débarquement des assaillants de 2004 à Haïti, rien n’est fait sur des accusations portées contre l’ex-premier Ministre Mme Duvivier PIERRE-LOUIS, rien n’est sorti du dossier de retour inattendu et la mort de l’ex-président de la République, Monsieur Jean-Claude DUVALIER, rien n’est sorti pour l’heure dans le cadre du dossier ‘’PetroCaribe’’, aucune poursuite effective relative à l’assassinat du prêtre Simoly JOSEPH n’est diligentée, rien n’est dit sur le massacre des habitants de ‘’La Saline, Cité de Dieu, Martissant, Grand Ravine, La Fossette, lors des derniers émeutes qui ont ravagé le pays. Aucune disposition judiciaire n’est prise contre les casseurs du six (6) et (7) juillet dernier, rien n’est dit sur la question des bandits lourdement armés entrainant l’insécurité sur tout le territoire national ; cependant, il est de principe de Droit que la justice exige que l’on répare le tort qu’on a fait (Jhonson SAMUEL).

Donc, nous comprenons que de par la faiblesse de la Justice haïtienne, le pays est totalement menacé. Personne ne respecte personne. Tout le monde est sur le qui-vive, et les grands intérêts nationaux échappent à la compréhension des citoyennes haïtiennes et citoyens haïtiens. Des autorités judiciaires appelant à faire respecter les lois, le font surtout au profit de leurs patrons du pouvoir exécutif, mais au préjudice de la nation, une façon pour consolider leurs postes nominatifs. Le principe qui veut que ‘’Le pouvoir arrête le pouvoir’’ s’inscrit sur du papier, alors que l’exécutif continue à avoir le contrôle du judiciaire pour empêcher que certains grands dossiers ne soient convenablement bien traités. Ainsi, la demande incessante de certains citoyens avisés sur le dossier ‘’PetroCaribe’’ avec pour formulation : ‘’Kot kòb PetwoKaribe a ?’’reste à désirer par nos dirigeants. Ce questionnement, par son embrassement d’une cause commune, peut-être étouffé au passage par les autorités compétentes en la matière vue l’impuissance de la Justice haïtienne.

Répétons avec ‘’Euripide’’ : ‘’Jamais, sans la justice, il n’y eut de bonheur véritable. C’est sur elle qu’il faut fonder son salut et ses espérances. Et il faut en tout état de cause savoir qu’où la justice décline, la société déchoit’’ (Emile de GIRANDIN).

18/12/2018

Delcarme BOLIVARD, Av.MA
Ecrivain

Crédit photo : Google, consulté le 14/12/2018 à 15 hs 22 

jeudi 6 décembre 2018

"Kredi atè plat" : Un refrain à effet de résonance perturbatrice de la raison citoyenne

La cohérence de la politique moderne requiert qu'on octroie le mérite avec réserves à un gouvernement qui recherche à régner l'ordre et la discipline au sein d'une société. Mais, les indices à utiliser pour y parvenir ne doivent pas porter à l'équivoque de la compréhension et de l'esprit critique des citoyens avisés ou éclairés. Donc, notre réaction sur le programme baptisé "Kredi atè plat" est d'une part fondée sur une vive ovation du gouvernement haïtien en place face à la cherté de la vie et la flambée du dollar américain par rapport à la gourde. Et d'autre part, nous tenons délibérément à mesurer les effets positifs et négatifs d'un tel programme dans la société haïtienne.

Donc, disons, courage au gouvernement Moïse/Céant pour la nouvelle initiative économique populaire portée sur le thème : "Kredi atè plat". Cette marque d'apaisement social vient à un moment où la colère juvénile et citoyenne consciente exige d'un côté le procès "PetroCaribe", et d'un autre côté, l'exiguité  de la classe politique échouée formant l'opposition farouche haïtienne prônant le départ inconditionnel du Président Jovenel MOÏSE.

Cependant, nous craignons que le programme "Kredi atè plat" n'ait aucun fondement puisque jusqu'à date, personne ne sait la provenance du fonds qui va l'alimenter comme cela se droit. Nous serons sidéré d’entendre toutefois que le montant disponible pour le "Kredi atè plat" ait été prélevé du budget rectificatif national 2017-2018. Ainsi, non seulement manquerait-il à nos honorables parlementaires la vertu d'être appelés à contrôler l'exécutif dans ses diverses démarches et entreprises, mais c'aurait été aussi un mépris flagrant à la Constitution en vigueur surtout en son article 40 disposant : " Obligation est faite à l'État de donner publicité par voie de presse parlée,  écrite et télévisée, en langue créole et française aux Lois, Arrêtés, Décrets, Accords internationaux, Traités, Conventions, à tout ce qui touche la vie nationale, exceptions faites pour les informations relevant de la sécurité nationale" (sic). Dans le cadre du programme "Kredi atè plat", le droit à l'information des citoyens, est-il bafoué ou respecté? Pourquoi continuer à payer les parlementaires s'ils sont dépourvus du sens de l'analyse et du contrôle des actes posés par l'exécutif?
 
Le programme "Kredi atè plat" est venu pour refroidir la tension populaire où le Président de la République, Jovenel MOÏSE, se trouve implanté dans un système politique désorganisé par une opposition ne voulant s'inscrire dans l'échiquier des affaires de l'État que par la transition et l'anarchisme. Par la non maîtrise de la Sociologie politique haïtienne, le Président actuel peut tout tenter pour calmer la fureur de certains membres de la population, mais ce sera vain. Car, le manque de connaissances de la gestion de l'État peut tout chambarder au profit de son égocentrisme.

Tout comme à l'assainissement de l'aire métropolitaine de Port-au-Prince, notamment, la zone du Palais National, à la suite des derniers événements qui ont entièrement bouleversé le pays; l'apaisement social "Kredi atè plat" n'est qu'un refrain à effet de résonance perturbatrice de la raison citoyenne. Pour ce mode de crédit, quelle méthodologie va-t-on utiliser au choix des bénéficiaires? Quelle étude de terrain a-t-on réalisé pour savoir les zones cibles? Et quelle en était la firme responsable? N'est-il pas l'occasion pour l'État haïtien de continuer à appliquer le Décret du 17 mai 1995, portant sur la libéralisation du taux usuraire?

Cependant, il serait mieux de renforcer la politique de la Banque Nationale de Crédit (BNC) en permettant à l'État d'offrir des crédits à beaucoup plus de citoyens par un taux vraiment accessible.  De permettre à la Banque de la République d'Haïti (BRH) de générer des fonds pour alimenter les caisses de la BNC pour favoriser dans de très bonnes conditions, la création des Petites et Moyennes Entreprises (PME). Cela diminuerait au fil du temps, la pauvreté qui dévore la population, et empêcherait graduellement la migration forcée de nos concitoyennes et concitoyens vers les pays étrangers.

Soulignons que le "label" "Kredi atè plat" dans la sémantique et surtout dans la Sociologie linguistique haïtienne est mal choisi pour mener à bien un tel projet. De mauvaises connotations peuvent y être imaginées, dont : "Kredi atè plat" = "Kredi pou fini ak nou", "Kredi atè plat" (dans le commerce haïtien) "Vòlò bwote tout sa'n posede", "Kredi atè plat" (Dans le cadre de l'insécurité nationale) "Fout ou atè plat, ou pra'l konn kaw". Par ailleurs, cela peut-être aussi le cas de dire que le taux de ce crédit ne sera pas trop élevé.

Peu importe, dans la situation actuelle du pays, le gouvernement MOÏSE/CÉANT tente gauchement un acte, et vous l'opposition, que proposez-vous y?

02/12/2018

Delcarme BOLIVARD, Av.MA
Ecrivain

Crédit photo : google, consulté le 04/12/2018
Compteur Global

Culture