mercredi 14 décembre 2016

La Politique en Haïti : une mésinterprétation de la nature des choses


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La définition irrationnelle donnée au concept ‘’Politique’’ par la majeur partie de la population haïtienne est de considérer cette Science comme un véritable handicap au développement du pays[1]. Le peuple est sous le poids de sa conception politique vu que certains politiciens, appelés pour leur agissement, des ‘’traditionnels’’, ne font que plonger la valeur souveraine de cette Science dans l’immoralité, l’anarchisme, la barbarie et l’insécurité socio-économique[2]. Néanmoins, il reste à démontrer que la Politique comme telle, dans quelque pays que ce soit, n’est pas assujettie au privilège de l’inconscience humaine puisqu’elle (la Politique) est destinée à subvenir au bien être de la collectivité par une bonne gouvernance des choses publiques[3].

Contrairement aux mauvaises interprétations de la notion ‘’Politique’’ dans le milieu haïtien, comme quoi ; ‘’si tu veux la perte de ton fils, fais le politicien[4]’’, ce domaine d’étude s’approprie du devenir glorieux des citoyens désireux de vivre selon les vœux modernes des droits de l’Homme par l’émission de grandes idées, des théories et l’établissement des écoles de pensées. Ainsi, les dérives liberticides de la rationalité de la Politique en Haïti a pour causes le paradigme de l’ignorance en la matière de certains acteurs politiques et surtout l’implication pesante de la masse populaire aux stratégies de gouvernance de l’État sans un brin de formation relative aux notions de ‘’Droit’’, ‘’Sociologie’’, ‘’Civisme[5]’’, etc.

Notre considération sur le sujet est portée depuis la genèse du système politique haïtien soit exactement après l’indépendance nationale. Nous avons compris que les dirigeants du pays ne se sont jamais accentués sur ce qu’est la POLITIQUE au sens propre du terme et par hypothèse de départ, nous pouvons avancer que nos pouvoirs politiques risquent de continuer à s’enlaidir à mesure que nous y posons des actes irrationnels et émotionnels. Donc, de post-esclavagisme jusqu’à cette date, rien n’a changé dans la façon de s’appliquer à la Politique. Le fondement de cette dernière, chez nous, est l’envie de s’enrichir et d’en abuser le pouvoir au détriment d’un peuple peu exigeant qui n’accepte de vivre sa vie que pour le présent[6].

La transversalité de la Science politique donne lieu à une véritable étude des phénomènes politiques pour l’institutionnalisation progressive d’un ensemble de champs du savoir, dont : le droit, l’économie, l’histoire, et la sociologie qui entraînent des exigences méthodiques et analytiques dans l’accomplissement de bonnes actions au profit de la collectivité. De-là, nous pouvons comprendre qu’en Haïti, l’ensemble de connaissances dont s’agit pour admettre et reconnaitre l’efficacité de la Politique, est loin d’être envisagé pour la simple bonne raison qu’il existe toujours un mythe à dévoiler en conséquence.

Par un manque de maîtrise de la gestion des choses publiques, nos acteurs politiques incarnent au niveau de l’esprit de la population, voire une minorité soi-disant formée, un dégoût et une méfiance à cette noble Science, c’est ce qui occasionne au cours de ces deux dernières décennies en Haïti, l’accès au pouvoir d’un groupe qui s’occupait de ses affaires religieuses, commerciales et culturelles (en 1990, avec le président Jean-Bertrand Aristide, 1996-2001, 2006-2011 les deux mandants du Président René Garcia Préval, 2011-2016 avec le Président Joseph Michel Martelly), face à une classe, appelée par plus d’un : ‘’La classe politique traditionnelle ou rétrograde’’. Cependant, essayant de les comprendre, trois démarches peuvent être envisagées :

1-       la politique (politics) : désigne la vie politique, l’arène où les responsables politiques s’affrontent pour la conquête du pouvoir.

2-      la politique (policy) : renvoie aux programmes d’action mis en place par une institution pour atteindre des objectifs donnés ;


3-      le politique (polity) : l’emploi du masculin renvoie à celui qui gouverne, qui exerce des responsabilités dans la cité (polis en grec), qui détient le pouvoir.

Dans le cas d’Haïti, c’est l’application de la première démarche qui est en vigueur où les pseudo-politiciens s’entredéchirent pour accaparer le pouvoir tout en dévalorisant la nature première de la Politique. Cela renforce l’idée des détracteurs qui finissent par croire qu’aucun politicien ne peut rien accomplir de sérieux pour le pays. Néanmoins, la dernière considération est prise en otage par un système démocratique haïtien mal équilibré, forgé ou taillé à l’aune  de l’occident (Cependant, on interprète très mal la façon de faire la Politique dans ce continent.) cherchant à nous faire oublier tout le sens de notre culture par une pratique de l’ethnocide. Et quand la Politique d’un État n’est pas forte afin de réguler ou de gérer les conflits inhérents à des membres d’une même société, l’idée de "la violence légitime[7]" prônait par Max Weber, serait sans effet.

De ce fait, nous  ignorons les quatre sous-disciplines propres à la Science politique présentées par Philippe Braud. À savoir :

-          la Théorie politique
-          la Sociologie politique
-          la Gouvernance et les politiques publiques
-          les Relations internationales[8]

Cette méconnaissance de la réalité empirique de la Politique moderne ne fait que nous plonger dans des chaos et des crises sociétales qui peuvent prendre une ampleur extraordinaire au sujet de  la décrépitude de notre pays.
Si l’histoire de la Science politique nous montre une transmutation des méthodes rigoureuses et analytiques utilisées par les premiers penseurs politiques, tels que : Thucydide, Platon, Aristote pour ne citer que ceux-là, dans le cadre d’expliquer la manière de gérer et de contrôler l’État, chez nous en Haïti, la réalité de la Politique se dessine autrement sous l’assouplissement des cerveaux qui émettent des opinions erronées constantes en la matière. Il faut, dans cet ordre d’idée, considérer au cours de la Renaissance, le travail effectué par Machiavel[9] fondé sur  une différenciation essentielle de la politique et de la morale, sans omettre une réflexion mûre sur les phénomènes politiques timbrés de considérations éthiques ou philosophiques[10]

Charles Louis de Secondat, dit Montesquieu, à travers son ouvrage socio-juridique et politique, nous présente la fameuse ‘’Théorie de la séparation des pouvoirs[11]’’, explique les attributions et la nature de différents régimes politiques ignorés sur toute la ligne par les acteurs politiques nationaux qui n’agissent que pour l’effondrement de la société haïtienne.

De toute évidence, les acteurs politique haïtiens doivent s’aligner aux côtés de grandes idées politiques afin de poser des actes concrets au profit d’une population qui ne cherche qu’à être satisfaite en partie pour n’être pas formée et éduquée. Cependant, il nous faut penser une population autrement caractérisée par le savoir et la culture de faire, d’accepter ce qui est juste et bon. Et pour empêcher la détérioration de la valeur de la Science politique dans notre milieu haïtien, il nous faut nous positionner du côté des normes établies destinées à mener la barque de la nation à bon port. Ainsi, toutes mésinterprétation de la nature des choses seront redressées pour permettre au pays d’avoir un mieux être[12].

 
14 /12/2016
Delcarme BOLIVARD, Av. MA
Responsable de communication à www.ulh.edu.ht
Directeur/Fondateur de NESA (Nouvelle Ecole des Sciences et des Arts)



[1] .- Dr Prince Pierre Sonson: ‘’Haïti, État de choc’’.
[2] .- Delphine Thizy: ‘’Haïti ou Souveraineté impossible’’.
[3] .- René Chateaubriand : ‘’Réflexions politiques’’.

[4] .- Expression populaire haïtienne.
[5] .- Professeur Leslie François Manigat: ‘’La crise contemporaine’’.

[6] .- Andrew Blandford : ‘’Analyste politique’’ du COHA research group.

[7] .- Max Webber: ‘’Conception de Pouvoir politique de Max Webber’’.
[8] .- Phillipe Braud: ‘’La Science politique’’.
[9] .- Nicolas Machiavel: ‘’Le Prince’’.
[10] .- Denis Monière/Jean Herman Guay: ‘’ Introduction aux théories politiques’’.

[11] .- Montesquieu: ‘’De l’esprit des lois’’.
[12] .- Hérold Jean-François: ‘’Haïti autrement’’.
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