vendredi 15 novembre 2019

Haïti : Le dysfonctionnement de l'école : À qui profite-t-il?

encrejournal
Quand on déduit que même en état de guerre l'école doit continuer à fonctionner, cela fait montre de l'importance qu'on donne à l’éducation. En effet, dans un État en crise, tandis que les élèves, sans ambages, se rendent à l'école où les parents et les professeurs sont sains d'esprit pour assurer l'avenir des enfants, exprime l'autorité des dirigeants à maintenir la paix et la sérénité au sein de cette société.

À notre sens, les conflits entre deux États ou entre les citoyens d'un même État ne pourront pas handicaper l'apprentissage à l'école, si et seulement si l'éducation dans ces États ou dans cet État est réservée à tous. Autrement dit, le blocage du pain de l'instruction au moment de hautes turbulences sociopolitiques, est la preuve que les responsables de l'État ne jouent pas leurs rôles, plus simplement, le système d'éducation était déjà dysfonctionnel.

Le cas d'Haïti ces derniers temps en matière d'enseignement scolaire est plombé dans une disgrâce infinie caractérisée par la perte d'autorités des représentants de l'État. D'événements après événements, le destin des apprenants haïtiens se voile sous le fait de la négligence du respect des valeurs. Ainsi, à Haïti,  on se rend à l'école, mais, très difficile de prédire ce que l'on deviendra dans la vie. La chance de réussite est peu perçue sur la visibilité de l'échec de manière exponentielle.

Les revendications populaires qui sévissent dans le pays depuis plus d'un an, ont de grandes répercussions négatives sur toutes les sphères de la vie nationale. Approximativement tous les secteurs y enfilent et dont les conséquences nuancées laissent à désirer. De l'insécurité généralisée en passant par la fermeture momentanée de l'école dans certaines grandes villes d'Haïti, la conjoncture de l'heure fait peur et annonce le désespoir.

Les observateurs scientifiques cherchent à déterminer constamment les causes d'un fait par la compréhension de ses conséquences. Ainsi, considérant la nature politique de la situation actuelle d'Haïti, nous sommes en droit de savoir ce qui est à la base de tout cela. C'est vrai, le maquillage ou le fondement de leurs protestations, à savoir les opposants du pouvoir en place, peuvent être contraires à la réalité, cependant toutes les couches sociales se mobilisent et plaident pour leur mieux être sous un dénominateur commun, celui de la démission du Président de la République, Son Excellence Monsieur Jovenel MOÏSE.

Revenons sur la question de la fermeture involontaire de l'école à Haïti, nous sommes totalement intéressé à savoir à qui profite cet acte. En fait, pourquoi l'international ne pipe mot sur le triste sort de l'éducation à Haïti ? L'État haïtien,  n'est-il pas favorable à cette fermeture? Et qu'en est-il de la bourgeoise (commerçants étrangers internationaux sous couvert de secteur privé haïtien) et de l'opposition? Le peuple haïtien, occasionne-t-il le blocage de l'apprentissage scolaire?

*Du côté de l'international*

Le mépris de l'international à notre système éducatif ne date pas d'hier. On se rappelle les obstacles rencontrés par nos jeunes haïtiens pour franchir les portes de certaines Universités américaines et européennes. S’ils n'y sont pas accueillis pour manque de niveau académique, ils y sont après bien des années de formations supplémentaires.

Les indices les plus visibles chez l'international en ce qui se rapporte aujourd'hui à l’arrêt de l'école à Haïti, est que, plus l'école dysfonctionne, plus les citoyens haïtiens seront inconscients de leurs états. Ou du moins, pour l'international, à mesure que les portes des établissements scolaires à Haïti se ferment, c'est à mesure que le peuple sera en état d'exploitation à outrance à un moment où le développement de la technologie sous ses yeux sera insignifiant. A ce propos, le peuple sera soumis aux ordres forcenés des puissances mondiales lui faisant croire qu'il ne doit vivre que pour le bas ventre dans des séries scéniques de plaisirs liés à la débauche.

À titre de rappel, moins on est de bas niveau, surtout de statut irrégulier à l'échelle internationale, moins la main d'œuvre est réduite. Et qui pis est, le travailleur illégal n'a aucune assurance sociale dans l'accomplissement de ses tâches. Donc, tout est au profit de celle ou de celui qui embauche.

Donc, la fermeture de l'école à Haïti ne veut rien dire pour l'international qui en tire au contraire de grands avantages, dont : l'ignorance de la population, l'inconscience des citoyens, l'exploitation et la domination du pays.

 *Du côté de l'État haïtien*

L'État haïtien au sens plein du thème, représenté par le gouvernement actuel ne se soucie guerre de l'éducation nationale. En effet, l’obstruction à l'école aujourd'hui par des troubles sociopolitiques axées prétendument sur la question du Changement de "système", ne choque nullement l'esprit de nos dirigeants. Pour cause, non seulement, ils n'en prennent pas des mesures appropriées, mais veulent tout régler politiquement en mettant de côté l'aspect technique de la situation. Au lieu de s'y attacher pour résoudre le problème, les autorités étatiques responsables de la garantie et de la protection des libertés publiques de la population, se contentent de jouer au ridicule en changeant et promouvant certains proches des postes nominatifs à travers tout le territoire national, rien que pour consolider leurs pouvoirs.

Par ailleurs, pourquoi l'État haïtien, ne serait-il pas soucieux de la fermeture de l'école dans un contexte aussi fragile que celui d'aujourd'hui? N'est-il pas à la base de tout cela? L'éducation de la population de manière massive, ne devrait-elle pas être une préoccupation de l'heure pour l'État haïtien?

À la lumière de certaines considérations ci-après faits, nous sommes convaincus que le dysfonctionnement de l'école aujourd'hui à Haïti est profitable à l'État. Cette approche est fondée sur un ensemble de constats et de faits prouvant la négligence de l'État haïtien en matière d'éducation.

Avec la fermeture de l'école aujourd'hui, les professeurs des écoles publiques, des Universités d'État et publiques, qui savaient être rémunérés chaque deux ou trois mois pour certains, et un ou deux ans pour d'autres, seront restés coincés chez eux sans rien recevoir. Pour être payés, ils ne pourront plus s'attaquer aux responsables de l'éducation nationale qui leur diront d'ailleurs que le pays est en mode "lock ", par conséquent, la caisse de l'État est vide.

L'État se délibérera de la garantie du droit à l'éducation contrairement au prescrit de l'article 32 de la Constitution du 29 mars 1987, amendée le 09 mai 2011. La fermeture de l'école aujourd'hui soulagera l'État et les collectivités territoriales dans leur charge éducative à la population et la gratuité de l'enseignement des secteurs publics et non publics, tout, au mépris de l'article 32.1 de la même Constitution. En quelque sorte, la fermeture de l'école est un privilège direct et important pour l'État de ne pas appliquer entièrement la "Section F" de la Constitution en vigueur relative à l'éducation et à l'enseignement. En fait, comme nous sommes en matière politique, les autorités étatiques d'Haïti diront que c'est l'opposition qui empêche que les établissements scolaires fonctionnent.

Jusqu'à date, la loi Kelly sur les frais scolaires ne s'applique pas. Les parents haïtiens sont sous le poids de l'irresponsabilité de l'État face à un plausible secteur privé inactif. Aucune procédure sérieuse n'est engagée en la matière auprès des établissements scolaires. Et le Ministère de l'Éducation Nationale et de la Formation Professionnelle reste muet face à la situation pendant qu'il soutient l'exécutif dans ses démarches félonnes.

*Du côté de l'opposition*

L'une des armes la plus puissante dont se sert l'opposition farouche haïtienne à l'heure actuelle, est la fermeture des établissements scolaires. Elle ne laisse une seconde sans décider que les enfants restent chez eux, de peur qu'ils ne soient enlevés ou tués par les membres du gouvernement en place. Ce même discours se prononce par le gouvernement faisant croire aux parents que les acteurs de l'opposition sont prêts à exécuter les élèves, au cas où ils iraient à l'école. Quel contraste!

Qu'il s'agisse de l'opposition radicale ou modérée, la même observation se fait, laissons les portes des établissements scolaires fermées. Pour ces opposants du pouvoir en place, plus les élèves ne se rendent pas à l'école, plus le pays aura des citoyens manipulables, victimes de la théorie du mensonge. Ainsi, reconnaissons-nous qu'un peuple qui n'est ni éduqué ni instruit est un instrument nuisible et dangereux à la société.
L'opposition politique haïtienne quelle que soit sa nature sait pertinemment que la fermeture de l'école aujourd'hui permet aux citoyennes et aux citoyens de s'autodétruire dans des luttes mal planifiées et dans des revendications insignifiantes. La position de certains acteurs de l'opposition haïtienne face à la situation actuelle se lie à la nécessité pour ces politiciens traditionnels d'avoir sans inquiétude le contrôle de la mentalité de la population. Et tout comme l'État haïtien, l'opposition est pour la fermeture de l'école, car, cet acte lui permet de rabaisser le niveau de réflexion et de compréhension de la population qui patauge dans la misère, surtout dans des quartiers populeux.

*Du côté de la bourgeoisie*

D’entrée de jeu, nous disons haut et fort que le concept "bourgeois" à  Haïti est impropre, connaissant ce que représente cette classe dans une société. Nous ne nous attachons pas dans cet article à développer ce que c'est que la bourgeoisie à Haïti, car, une telle étude à part doit se faire. Dans une phrase nous disons que c’est une partie du secteur privé inactif haïtien qui s'appelle "Bourgeoisie" et rien que cela.

Impropre ou pas, la bourgeoisie haïtienne en réalité se confond avec l'État et l'opposition dépendamment des intérêts à défendre ou protéger. Tantôt, elle investit dans la prise et consolidation du pouvoir, tantôt elle accompagne l'opposition dans la quête du pouvoir (Par coup d’État quelquefois avec le concours des forces militaires nationales et internationales) ou la déstabilisation de l'État selon le cas qui se présente. Donc, le comportement de cette bourgeoisie est le reflet ou l'image de l'État et celle de l'opposition. Ce qui signifie que les plus grandes décisions de l'État haïtien et de l'opposition proviennent de la volonté de la bourgeoisie.

Considérant la fermeture de l'école aujourd'hui à Haïti, les commerçants étrangers internationaux habitant le pays, connus sous le vocable "bourgeoisie haïtienne", ont une grande part de responsabilité. Quand les établissements scolaires se dysfonctionnent, les prétendus bourgeois haïtiens pour défendre leurs intérêts sociopolitiques et économiques, seront plus aptes à armer des jeunes dans des quartiers populeux au détriment de leur avenir. Comme ils ont le capital économique, les bourgeois haïtiens dont les enfants fréquentent régulièrement des écoles étrangères (Cela existe et du côté des dirigeants haïtiens et du côté des membres de l’opposition) pour cause d'insécurité  nationale et de l'échec total du système éducatif haïtien, déboursent sans réserve pour empêcher que les élèves des parents pauvres aillent à l'école. Car, plus ces enfants ne se rendent pas à l'école, plus avec le temps ils seront au service des dirigeants sociopolitiques et économiques du pays.

En effet, disons, à la lumière de l'ensemble des démarches ci-dessus, que la bourgeoisie haïtienne ne s'intéresse pas au progrès de l'éducation nationale. Par conséquent, est au profit pour elle, la fermeture de l'école à Haïti.

*Du côté du peuple*

Comment imaginer que la fermeture des portes des établissements scolaires à Haïti serait profitable à la population? Quels seraient les avantages au cas où cet acte s'accorderait par la masse? Pourquoi en aurait-il été convenu, pendant qu'il se tapit dans la misère la plus acerbe? Autant de questions à poser pour mieux comprendre les conséquences de la fermeture des écoles au regard de la masse défavorisée haïtienne.

Le coup de l'histoire sociopolitique haïtienne ne change point, c'est le déterminisme pluraliste. Dessalines au nom de la liberté et de l'indépendance fit bruler presque tous les établissements scolaires; Christophe, dans le Nord du pays, pour démontrer sa nervosité contre un éventuel retour des français incendia sa maison et une bonne quantité d'écoles à Cap-Haïtien; des portes de prison sous les ordres de Jean-Pierre Boyer s'ouvrirent pour la fermeture des établissements scolaires; François Duvalier demanda de fermer certains établissements scolaires de ses opposants et d’exiler ces derniers afin de consolider son pouvoir ; Jean-Bertrand Aristide fit rouer de coups certains étudiants de l’Université d’État d’Haïti (UEH) pour causes politiques, Michel J. Martelly paralysa les écoles à Haïti avec la question de la gratuité de l’école restant comme une utopie ; Jovenel Moïse ment le peuple sur la question de pourcentage à réserver sur la vente des bananes au profit de l’éducation nationale ; entre autres, des crises politiques provoquées à la faveur d'un petit groupe dans le pays contribuent au dysfonctionnement des écoles à Haïti, ce, de gouvernement en gouvernement. En tout cela, la population est toujours victime.

Ainsi, le chaos provoquant le dysfonctionnement des écoles aujourd'hui à Haïti, ne sont pas profitables à la population. Plusieurs raisons l’expliquent : Les parents pauvres sont incapables d'envoyer étudier à l'étranger leurs enfants. Ces derniers, une fois qu'ils ne reçoivent pas une instruction solide, deviendront des bandits à la solde de l'État, de l'opposition et de la bourgeoisie. Le dysfonctionnement des écoles paralyse voire tue les petites activités économiques informelles de la population. C'est la descente aux enfers de la prétendue classe moyenne. Tout est quasiment bloqué puisqu'à Haïti les écoles, qu’elles soient privées ou publiques constituent de véritables employeuses pour la plus grande partie de la population. Tout en dépend : les directeurs, les censeurs, les professeurs, le petit personnel, les chauffeurs de taxis et les motards, les petits commerçants, etc.

Donc, la fermeture des écoles à Haïti donne lieu ou engendre des citoyens morts-vivants qui n'aspirent à rien sinon qu'à leur ventre et qu'aux plaisirs sociaux de toutes espèces. Elle crée des citoyens sans conviction et dépourvus de capacité de savoir choisir leurs dirigeants aux élections. De-là, ils délèguent leurs droits involontairement et émotionnellement à certains élus dont la mission est de piller à tout jamais la caisse de l'État. Emmanuel Kant nous apprend : " _L'homme ne peut devenir l’homme que par éducation_." Cette cogitation nous met à claire la population non éduquée et instruite qui contribue sans même qu'elle ne sache à la corruption et la dépravation de l'État haïtien par le vote des incompétents, faute d'avoir reçu un enseignement scolaire équilibré.

Kant poursuit : ‘’ _Il n y a personne qui, ayant été négligé dans sa jeunesse, ne soit capable d’apercevoir dans l’âge mûr en quoi il a été négligé, soit dans la discipline, soit dans la culture. Celui qui n’est point cultivé est brut, celui qui n’est pas discipliné est sauvage (…)._‘’

En effet, par hypothèse vérifiée, nous concluons clairement que le dysfonctionnement de l’école à Haïti est profitable à l'international, à l'État, à l'opposition et à la bourgeoisie. La population haïtienne ne fait, en pareil cas que continuer à en être victime. Mais demandons-nous logiquement aujourd'hui pourquoi la fermeture ou le dysfonctionnement des écoles à Haïti? L'école à Haïti, n'était-elle pas déjà en mode "lock" avant même que la situation sociopolitique ne s'aggrave avec le temps? Quand n'importe qui s'intéresse à ouvrir n'importe comment une école classique ou un centre professionnel ou une université, n'est-il pas un acte d'échec de l'éducation nationale? Quand les professeurs ne sont pas rémunérés à temps, n'est-il pas une marque de dysfonctionnement des écoles? Quand nos élèves sont de bon à rien, n'est-il pas un facteur de dysfonctionnement des écoles? Quand après nos cycles secondaires et universitaires, sommes-nous obligés de faire n'importe quoi pour survivre ou nous déplacer pour nous mettre au service involontairement de certains pays, dont : le Chili, le Brésil, l'Argentine, les États-Unis, le Canada, pour ne citer que ceux-là, n'est-il pas un mépris des écoles de chez nous? Quand nous n'avons pas la même chance de réussite, n'est-il pas une occasion de parler de l'échec de notre système éducatif?

Georges Jacques DANTON déclare et nous citons : " _Après le pain, l'éducation est le premier besoin d’un peuple."_ Pourtant chez nous à Haïti, nous n'avons ni l’un ni l’autre. Car, la majorité de la population vit avec moins de deux dollars américains par jour et ne bénéficie d'aucune éducation sérieuse. Et Jean-Jacques Rousseau d'avancer : ‘’ _L'éducation fait l'homme passer de l'état de nature à celui de raison_ .’’ Donc, si nous voulons raisonner la population haïtienne pour qu'elle puisse agir comme Homme, donnons-lui une solide éducation et instruction. De-là, elle se connaitra et connaitra ses droits et devoirs.

13/11/2019

 *Delcarme BOLIVARD, Av.MA*

Crédit photo : Google, consulté le 13/11/2019
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