vendredi 19 novembre 2021

ÉTHIQUE/DÉONTOLOGIE : ENTRE SIMPLE COMPRÉHENSION ET LA PROFESSION D’AVOCAT À (EN) HAÏTI

 Résumé 

S’intéressé au mode de fonctionnement, au respect, à la dignité voire à la conscience qui doivent caractériser ou animer tout avocat professionnel, font toujours l’objet d’étude, d’analyse et de réflexion avancée. Il n’est pas sans savoir qu’étudier le droit comme science normative et de soumettre à toutes les obligations académiques sont très loin de faire de quelqu’un un avocat au sens plein du mot.

Les vicissitudes et les déboires de la vie peuvent en quelque sorte dévier ou leurrer le professionnel du droit. Cela peut se produire s’il ne cherche pas à se conformer à l’ensemble d’exigences d’éthique et de déontologie qui définissent très clairement des principes, des devoirs et des normes auxquels il doit s’attacher. Donc, un bon avocat, outre toutes les procédures, tous les méandres de sa profession qu’il doit maîtriser très largement, doit être un spécialiste qui se respecte et inspire du respect et de la conscience de celles et de ceux pour qui il prend la parole dans l’objectif de défendre leurs causes.

L’idée de présenter ce qu’est l’éthique dans sa plus simple signification structurelle est la base de cet article. Celui-ci est porté sur une approche épistémologique de la profession d’avocat à Haïti en considérant la déontologie comme fondement de l’exercice de cette profession. En effet, une mise en contexte de certains instruments juridiques est prise en compte dans ce travail afin de mieux placer l’avocat dans une dynamique de savoir, de savoir-faire et de savoir-être.

Introduction

La profession d’avocat est aussi vieille que le monde[1]. La pratique de défendre les faibles face aux préjugés de la société fut remarquée copieusement par le soutien des avocats qui s’oublièrent pour les causes d’autrui. Ainsi, de même qu’au niveau de la démocratie, l’avocat joue un rôle majeur dans la viabilité de la justice à rendre aux citoyens.nes au nom de la loi et de la République. D’où le concept d’État de droit à toute son utilité, ou encore plus, son application sociétale, du fait que les avocats participent au maintien du système judiciaire aidant les magistrats à mieux décider selon l’esprit et la lettre des textes de loi.

L’avocat, ami fidèle d’une vérité, celle que lui soumet et lui donne ses clients qu’il aura à défendre par des arguments de toutes sortes au prétoire, doit se convertir toujours en un ministère de soutien des droits fondamentaux de l’être humain. Ceci étant dit, l’avocat, en lieu et place d’être un simple artisan des mots et des expressions pour se soutirer de l’argent de la part de celles et de ceux pour qui il fait parler la loi, est un défenseur public. Par ailleurs, l’avocat qui ne se respecte pas risque d’être mal vu par la société et surtout par ses clients dont les droits et intérêts méritent d’être défendus en toute honnêteté, crédibilité et science. Donc, l’avocat, outre ses multiples dynamismes juridiques, est appelé à cultiver la vertu, l’éthique et la déontologie afin qu’il agisse avec âme et conscience dans la défense des libertés publiques.

La Bruyère, dans son ouvrage s’intitulant : Les caractères, fait un portrait significatif et exceptionnel de l’avocat. Au niveau du chapitre de ‘’De la chaire’’, dudit ouvrage, l’auteur nous apprend que : ‘’ La fonction de l'avocat est pénible, laborieuse, et suppose dans celui qui l'exerce un riche fonds et de grandes ressources. Il n'est pas seulement chargé, comme le prédicateur, d’un certain nombre d'oraisons composées avec loisir, récitées de mémoire, avec autorité, sans contradicteurs, et qui, avec de médiocres changements, lui font honneur plus d'une fois. Il prononce de graves plaidoyers devant des juges qui peuvent lui imposer silence, et contre des adversaires qui l'interrompent. Il doit être prêt sur la réplique ; il parle en un même jour, dans divers tribunaux, de différentes affaires. Sa maison n'est pas pour lui un lieu de repos et de retraite, ni un asile contre les plaideurs ; elle est ouverte à tous ceux qui viennent l'accabler de leurs questions et de leurs doutes. […]. Il se délasse d'un long discours par de plus longs écrits, il ne fait que changer de travaux et de fatigues ; j'ose dire qu'il est dans son genre ce qu'étaient dans le leur les premiers hommes apostoliques[2].

En effet, ce travail que nous réalisons est l’expression ou le résultat d’une recherche basée sur l’éthique et la déontologie de l’avocat haïtien dans l’exercice de ses fonctions. Il est divisé en trois (3) parties :

1- La première partie est titrée : L’ÉTHIQUE ET LA DÉONTOLOGIE, SIMPLE COMPRÉHENSION. Elle nous aide à faire un survol admiratif et considérable sur les concepts ‘’éthique et déontologie’’.

2- La deuxième partie est intitulée : L’ÉTHIQUE ET LA PROFESSION D’AVOCAT. Elle permet d’étudier le comportement professionnel de l’avocat dans l’exercice de sa fonction, soit en face de ses confrères, ses clients, soit à l’égard de la société.

3- La troisième partie est identifiée sur l’idée : LA DÉONTOLOGIE DE LA PROFESSION D’AVOCAT À (EN) HAÏTI. Elle présente les instruments et les documents juridiques servant à réglementer et structurer la profession d’avocat.

La conclusion de ce travail est axée sur une approche faite par Emmanuel Kant. Laquelle approche, nous permet de savoir l’importance de la vertu dans l’accomplissement des choses sérieuses. Elle s’ouvre sur une perspective en laissant de nouvelles pistes à exploiter par d’autres chercheurs qui souhaiteraient s’aventurer au niveau de la thématique abordée.


1.      L’ÉTHIQUE ET LA DÉONTOLOGIE, SIMPLE COMPRÉHENSION

 

1.1 La compréhension sur l’éthique

Le mot éthique, a été longtemps mis à l’étude afin de trouver non seulement ses fondements dans la société, mais surtout d’évaluer son apport relatif à l’être humain. Si au cours du Vème siècle avant l’ère chrétienne, où le philosophe Mo-tsea en Chine discutait, entre autres, sur la question de Justice, la légitimité des guerres, la lutte contre la pauvreté, les privilèges des puissants ; il était évident pour lui qu’une pratique traditionnellement acceptée pour vraie soit bonne. Il est à noter qu’à cette même période de grands philosophes, tels que : Conficius, Platon, Aristote et autres se faisaient distinguer par leurs prises de position au sujet du concept ‘’Éthique’’. 

Avec l’évolution de l’humanité, le mot éthique prend de l’ampleur. À ce stade, avant que nous ne donnions une tentative définitionnelle à l’éthique, une interprétation y relative nous intéresse beaucoup. Celle-ci est l’œuvre de Michel Métayer avançant que ‘’L’éthique est une réflexion portant sur un aspect fondamental de l’action humaine que nous désignons habituellement par le terme morale[3]’’.

La définition ci-dessus nous permet de saisir l’importance de l’éthique dans les activités humaines et nous renvoie à la désigner comme un vecteur d’amour entre ce que l’on fait et ce que l’on est certainement. En effet, à notre sens, l’éthique est un ensemble de préceptes tendant au maintien des valeurs humaines, portant sur le respect de soi et celui de l’autre, dans le dessein d’accomplir sûrement sa tâche, ou d’établir ses relations étroites avec ses sembles et son environnement. L’éthique, outre sa finalité axée sur le bien, la perfection et le bonheur[4], c’est l’étude du comportement acceptable de l’être humain au niveau de la société.

Notre sens d’analyse nous permet également de déterminer l’éthique comme un ensemble de savoir (Que faire ?), de savoir-faire (Comment faire ?) dans leur finalité (Pourquoi faire ?). Cet ultime examen relatif à l’éthique, nous montre à clair que ce terme est présent dans toutes les activités de la vie courante tout en apportant des normes et des principes régissant le bon fonctionnement de l’homme. Mais, le concept éthique, est-il toujours perçu de la même façon chez des penseurs ? y a-t-il une nécessité de la pratiquer sans contrainte ? Que dire la société à propos de l’éthique?


        1.2 : La compréhension sur la Déontologie 

Dans cette partie du travail, nous allons consacrer quelques définitions relatives à la déontologie pour mieux placer celle-ci dans le contexte professionnel de l’homme de l’art. Ainsi, plusieurs définitions en pareil cas vont être retenues, ce, pour permettre aux lecteurs de bien saisir le sens de la déontologie.

Le mot ‘’déontologie’’ a été créé par Jeremy Bentham en 1834 dans le sens général de sciences de la morale[5]. Il faut bien se rappeler qu’avant cette date, les professionnels de la médecine se sont donnés des règles de conduite correspondant depuis le XXème siècle au ‘’Serment d’Hippocrate[6]’’. En effet, le terme ‘’déontologie’’ vient du grec ‘’deontos’, ayant pour signification ‘’devoir[7]’’. Elle est un ensemble des règles et des devoirs qui régissent une profession, la conduite de ceux qui l'exercent, les rapports entre ceux-ci et leurs clients et le public[8]. C’est également un ensemble des règles morales qui régissent l'exercice d'une profession ou les rapports sociaux de ses membres[9].

La déontologie est un ensemble de règles qui s’appliquent dans un contexte professionnel. Il s’agit de poser les conduites acceptables pour la profession ou la fonction concernée. Ces règles sont d’abord juridiques : pénales, civiles ou indemnitaires ainsi que disciplinaires[10]. Selon Hottois G., la déontologie est une éthique professionnelle qui s’applique aux individus seulement en tant qu’ils exercent un métier déterminé et qu’ils ont, dans ce cadre, des obligations, des responsabilités et des droits[11]. La déontologie doit garantir le bon exercice d’une pratique professionnelle compte tenu de son insertion au sein d’une société elle-même globalement régulée par la morale, les lois, le droit[12].

René Auclair, essayant de comprendre le concept déontologie, avance ce qui suit : ‘’Quant à la déontologie ou morale professionnelle, cet ensemble de règles pour la conduite du professionnel dans l'exercice de sa profession, elle comporte un rapport aux valeurs premières, aux postulats de base de toute éthique. Les finalités qui nous semblent les plus explicites sont les suivantes :

1. assurer la protection du public en favorisant une pratique professionnelle consciencieuse, responsable et de haute qualité ;

 2. aider le professionnel à faire preuve d'un comportement éthique plus exigeant que celui qu'on attend du commun des mortels ;

3. éviter des situations conflictuelles entre professionnels appartenant à une même profession ou à des professions apparentées ;

4. sauvegarder une bonne image et le renom de la profession auprès du public ;

5. légitimer un statut socio-économique privilégié et un statut juridique particulier (par exemple la corporation)[13].

Pour nous, la déontologie est une structure normative régissant le mode et le modèle de fonctionnement de tout professionnel dans l’exercice de son domaine. Cette structure directive ayant pour finalité le contrôle du professionnel face à lui-même, face à ses collègues, face à ses clients et surtout face à la société en général. Par ailleurs, dans le cadre de notre travail, nous avons choisi bon de ne pas citer toutes les définitions données à la déontologie. Cela ne se porte sur aucune discrimination par rapport à certaines définitions qui n’y ont pas été mentionnés, mais nous avons voulu simplifier notre démarche afin que nous soyons plus ou moins compréhensif par plus d’un. Ainsi, considérons-nous dans la présente recherche la définition du concept déontologie offerte par René Auclair. Le motif fondamental de ce choix est parce que l’auteur explique dans sa définition tout ce dont nous allons parler tout au long de ce travail.

 

2.      L’ÉTHIQUE ET LA PROFESSION D’AVOCAT À (EN) HAÏTI

Appliquer les normes et les principes qui gouvernent l’éthique dans un pays comme Haïti, n’est pas chose facile. Subséquemment, les professionnels haïtiens de tous domaines confondus voulant se faire respecter à propos de ce que demande l’éthique, connaissent de graves encombres. Ce constat parait toujours un véritable handicap au développement des valeurs humaines. Cependant, celles-là ou ceux-là qui acceptent de bien évoluer dans leurs entreprises quotidiennes, se voient bien appréciés.es en dépit du fait que leurs tâches ne sont pas aisées.

Étant appartenu à une coopération professionnelle, appelée Barreau, l’avocat militant[14] se trouve quelquefois confronté à des situations exceptionnelles qui pourraient le contrarier dans ses démarches juridiques et judiciaires. Cela est fort de le constater ou de l’évoquer puisqu’à (en) Haïti, ce qui prédomine aujourd’hui, c’est la voyoucratie (sans parler de la corruption, l’insécurité sociopolitique, etc.,) et la médiocratie, des fléaux qui rongent la société haïtienne y compris ses institutions. À force que ces facteurs déstabilisateurs envahissent toutes les sphères de la vie nationales, l’idée de se bien comporter dans l’amour du prochain et dans le respect de ses semblables accomplissant normalement bien sa fonction comme les vœux de l’éthique, parait vraisemblablement un rêve à concrétiser et se payant cher.

Entre le bien et le mal, l’avocat professionnel, dans le cadre de la gestion des dossiers juridiques dont il a la charge, doit chercher ‘’ipso facto’’ à vaincre le premier au bénéfice du deuxième, souventefois au préjudice de sa prise de position. Entre le bien faire et la compromission, il se doit désireux le premier quoique des fois cela lui vaille la peine. Et entre se rapetisser en acceptant de s’inscrire à un dossier juridique dans lequel il se voit déjà contraire à la finalité de l’éthique, qu’est le bien, la perfection et le bonheur, l’avocat professionnel doit s’apprendre que le respect de sa personnalité vaut beaucoup plus que l’émeraude.

Le trafic d’influence, le népotisme, le clientélisme, le favoritisme, l’avarice, entre autres sont des éléments fondamentaux de la corruption punis par la loi portant prévention et répression de la corruption du 09 mai 2014. Ceux-ci sont également contre l’éthique professionnelle et la déontologie caractérisant le métier d’avocat. Par ailleurs, dans certains dossiers juridiques initiés au tribunal, certains juges exigent de la négociation malhonnête avec l’avocat afin qu’il en ait gain de cause. Du moins, la partie adverse sollicite de lui une entente véreuse au mépris des droits et des intérêts du client à défendre. Déniant de s’introduire au profond bassin de la corruption, l’avocat probe risque de tout perdre comme procès même quand il aurait dû avoir le bon droit de son côté. Il doit s’opposer à toute forme d’attaque attentatoire à son éthique professionnelle, et continuer à défendre brillamment les droits et intérêts de son client au nom de la loi constituant sa boussole d’orientation et son instrument d’engagement.

Donc, du mal que cela puisse faire, face à ces genres de situation, l’avocat professionnel doit résister ou marcher dans la droiture même quand il sait très bien que cela peut lui coûter la vie dans un pays comme le nôtre. Nous osons le dire, puisque nous savons que beaucoup d’avocats qui ne veulent pas entrer dans la logique du mépris de la déontologie qui caractérise le métier de la défense des droits et des intérêts des clients au prétoire, ne gagnent pas facile un dossier indépendamment de leurs performances et de leurs sens d’analyse juridique.

3.      LA DÉONTOLOGIE DE LA PROFESSION D’AVOCAT À (EN) HAÏTI

Nous tenons, dans le cadre de cette recherche fondée sur l’éthique de la profession d’avocat, à passer en revue la déontologie de cette profession. Cela aidera à mieux aborder le mode opératoire à adopter par l’avocat professionnel soit à l’égard de ses clients, soit au niveau de son accompagnement de la justice pour son bon fonctionnement. Pour ainsi dire, il faut en même temps envisager l’éthique qui doit être appropriée à la conscience morale de l’avocat professionnel, et la déontologie qui expose les normes applicables aux droits et devoirs de ce professionnel.

En tout état de cause, l’avocat est tenu de stimuler loyauté et respect qu’il doit avoir pour lui-même dans l’accomplissement de ses actes. Il a l'obligation d'avoir une conduite irréprochable afin que son mérite, sa valeur et l'estime que l'on a de lui reste intact. La dignité d'un avocat c'est son honneur et sa réputation[15]. Le serment : ‘’Je jure d’observer, dans l’exercice de ma profession, les principes d’honneur et de dignité qui doivent caractériser les membres de l’Ordre des Avocats[16]’’ ; auquel tous les avocats haïtiens sont astreints, est un acte solennel qui couvre la conscience et la probité du professionnel du droit dans la défense des libertés publiques. Ainsi, au nom de la conscience professionnelle, l’avocat ne peut plaider des choses contraires aux révélations que lui a faites son client. Il a un devoir de loyauté[17].

L’Avocat Sans Frontière (ASF), dans ses pratiques d’études et de recherches sur la profession d’avocats, résume les règles d’or de l’avocat sur le plan d’éthique et de la déontologie de cette profession en sept (7) points. Il prouve que l’avocat professionnel est celui qui se respecte en se faisant respecter par sa manière de s’outiller pour la défense de la justice en s’appuyant sur l’application des textes de loi comme étant son serviteur, et le protecteur des libertés institutionnelles. Ainsi, pour l’ASF, le vrai et bon avocat est celui qui a de :

a)      la compétence ;

b)      l’intégrité et la loyauté ;

c)      la disponibilité, la prudence et la diligence ;

d)      l’indépendance et le désintéressement ;

e)      l’obligation de respecter le secret professionnel ;

f)       l’obligation d’éviter les conflits d’intérêts ou l’apparence de conflits d’intérêts ;

g)      la relation de confiance avec le ou la client[18]. 

En effet, comment parler de l’éthique et de la déontologie de la profession d’avocat à (en) Haïti sans se référer au Décret du 29 mars 1979 révisant la loi du 06 mai 1932, le décret du 21 janvier 1946, et réglementant, sur de nouvelles bases, l'exercice de la profession d'avocat en Haïti, et les Principes de base relatifs au rôle du barreau, adoptés par le huitième Congrès des Nations-Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s'est tenu à la Havane (Cuba) du 27 août au 7 septembre 1990. Ces deux textes de loi majeurs disposent suffisamment de matières nécessaires liées à l’éthique et la déontologie pouvant permettre aux avocats haïtiens de bien se comporter, qu’il s’agisse auprès de ses confrères, ses clients, au cours de sa plaidoirie au prétoire, mais aussi et surtout, qu’il s’agisse à l’égard de la société en général.

 

3.1     Décret du 29 mars 1979 sur la profession d’avocat en Haïti

À cette phase du travail sur l’éthique et la déontologie de la profession d’avocat à (en) Haïti, nous nous autorisons à placer dans le corps du travail ‘’expressis verbis’’, les 54, 55, 56, 58, 59, 60 et 61 du Décret du 29 mars 1979 relatif à la profession d’avocat à (en) Haïti.

Article 54.- A l’audience et partout, l’Avocat doit procéder en toute loyauté pour le triomphe de la Justice, en toute modération de langue nécessaire à la bonne harmonie entre le Barreau et la Magistrature.

Article 55.- Dans ses rapports avec ses confrères et ses clients, il devra :

1. Faire preuve de correction et de délicatesse ;

2. Observer la plus stricte convenance dans ses attitudes et paroles ;

3. Eviter, surtout à l’audience, les gestes inutiles et les mots blessants ou déplacés ;

4. S’abstenir notamment de toute agression physique ou morale ou même verbale ;

5. Répudier l’usage des pièces visiblement fausses ou altérées, sauf si elles sont produites en vue de leur rectification.

Toute violation de ces règles professionnelles entraînera l’infliction d’une peine disciplinaire, sans préjudicier aux sanctions ordinaires des Tribunaux de Droit Commun.

Article 56.- Le secret professionnel est un devoir absolu. L’avocat ne peut être tenu de déposer sur les faits dont il n’a connaissance que dans l’exercice de sa profession.

Article 58.- L’Avocat a droit à des honoraires pour les services rendus. Il peut demander une provision, sans contrevenir aux usages de la profession. Sauf convention contraire, ses honoraires seront de 20% des créances recouvrées et des condamnations susceptibles d’être évaluées.

S’agissant de règlements amiables avant toute plaidoirie, ils seront de 10%. Il en est de même pour le recouvrement d’une créance hypothécaire avec clause de voie parée. L’Avocat ne peut réclamer d’honoraires dans les causes plaidées d’office sur commission du Bâtonnier.

Article 59.- L’Avocat est responsable des pièces et documents dont on le constitue dépositaire. Il est bien tenu de les restituer. Toutefois, il peut les retenir jusqu’au paiement de ses honoraires.

Article 60.- Les Avocats qui assurent le service juridique des établissements publics ou privés à un titre quelconque (Contentieux, Avocat-conseil ou autre) doivent notifier le fait à la connaissance du bâtonnier et au Conseil de Discipline dans le mois de leur installation. Il est accordé à ceux qui prêtent déjà les services à ces institutions un délai de deux mois à partir de la promulgation de cette Loi pour se conformer à l’alinéa précédent. Les Avocats qui refuseront de se soumettre aux prescriptions de cet article, après deux avertissements, perdront le bénéfice de leurs inscriptions au Tableau. Un avis signé du Bâtonnier et autorisé par le Conseil de Discipline, sera publié pour porter le fait à la connaissance du public.

Article 61.- L’Avocat, pour les faits concernant sa profession relève du Conseil de Discipline ou des Juridictions de droit commun.

 

3.2     Les Principes de base relatifs au rôle du barreau et le comportement professionnel de l’avocat

Au niveau du chapitre consacré aux devoirs et responsabilités des avocats, les Principes de base relatifs au rôle du barreau croient bon de placer les avocats dans une posture indispensable à la bonne gestion de l’administration de la justice. Ainsi, étant auxiliaire de la justice, où la courroie de la moralité organique entre les juges et les justiciables dans l’application des textes de loi pour une justice forte et équilibrée, l’avocat est appelé à préserver à tous moments l'honneur et la dignité de sa profession[19]. À l’égard de ses clients, l’avocat doit être un homme honnête au sens plein du mot. Il doit les conseiller quant à leurs droits et obligations juridiques et quant au fonctionnement du système juridique, dans la mesure où cela a des incidences sur lesdits droits et obligations juridiques[20]; les assister par tous les moyens appropriés et prendre les mesures juridiques voulues pour préserver leurs intérêts[21] et les assister devant les tribunaux ou autorités administratives, le cas échéant[22].

Comme défenseur des veuves et des orphelins, l’avocat doit prendre du temps pour mieux préparer ses dossiers. L’article 14 du texte ci-dessus nous apprend également qu’en protégeant les droits de leurs clients et en promouvant la cause de la justice, les avocats doivent chercher à faire respecter les droits de l'homme et les libertés fondamentales reconnus par le droit national et international et agissent à tout moment librement et avec diligence, conformément à la loi et aux normes reconnues et à la déontologie de la profession d'avocat[23]. En effet, l’éthique fait exigence aux avocats de ne pas défendre ses propres intérêts ou ses intérêts personnels en défendant ceux de ses clients. Il doit au contraire servir toujours loyalement les causes de ses clients[24] sans qu’il soit pourtant en cause.

 

3.3     Autres instruments juridiques et documents internationaux non contraignants relatifs à l’éthique et à la déontologie des avocats

 

Ces instruments ne sont pas contraignants, mais, aident l’avocat à mieux se comporter dans l’exercice de sa profession. L’avocat haïtien est appelé à pratiquer et défendre l’esprit et la lettre de ces textes de loi pour se faire honorablement un nom dans le monde de la basoche. Ces instruments sont :

1-      La Déclaration de Genève : Respect de la primauté du droit et le rôle des juges et des avocats en temps de crise ;

2-      La Commission internationale des Juristes ;

3-      Les politiques et initiatives de l’Association du Barreau américain ;

4-      Les Standards de La Haye sur les standards éthiques des avocats qui comparaissent devant les tribunaux internationaux ;

5-       Les Principes internationaux de déontologie de la profession juridique ;

6-      Le Code international de l’éthique de l’Association Internationale du Barreau.

Nous voulons de manière concise jeter un regard sur quelques notes et articles des instruments ci-dessus afin de montrer comment l’éthique et la déontologie de l’avocat sont à considérer formellement si ce professionnel veut se faire respecter et se respecte également partout et ailleurs. Ainsi, les professionnels du droit doivent à la fois s’acquitter de leurs obligations à l’égard de la justice, de leurs clients, de leurs confrères et du public[25]. Ils exercent leurs fonctions avec probité, humanité et intégrité et ne peuvent compromettre l’honneur et la dignité de la personne humaine en exerçant leur profession[26]. Les comportements et les paroles de l’avocat à l’endroit des magistrats, de ses clients et confrères doivent être empreints de modération, courtoisie, convenance et délicatesse[27].

En raison de ses fonctions, l’avocat doit veiller au respect des droits humains[28] reconnus par le droit national haïtien et les instruments internationaux, dont la Déclaration universelle des droits de l’Homme et la Convention américaine relative aux droits de l’Homme[29]. Par ailleurs, les avocats doivent offrir des services dans des conditions d’égalité et sans discrimination fondée, entre autres, sur la race, la couleur, l’origine sociale, le sexe, etc.[30]. Tout traitement discriminatoire ou manquement à un devoir envers son client a des répercussions sérieuses sur l’accessibilité à la justice et la crédibilité du système aux yeux de la population[31]

4.      CONCLUSION

En effet, nous comprenons tous que la profession d’avocat n’est pas chose facile. Elle exige de la cohérence entre le comportement éthique de l’avocat et les intérêts des clients à défendre en toute loyauté. L’avocat professionnel doit se garder à être au-dessus de la mêlée et travailler pour être avant tout, un bon citoyen universel. Il doit savoir qu’avant d’accepter un dossier dans son cabinet d’étudier la faisabilité de celui-ci de peur qu’il soit critiqué farouchement par son client pour manque d’efficacité et de productivité juridique. Ainsi, l’avocat conséquent doit éviter de prendre les dossiers de son ou ses confrères ou consœurs, sauf des pourparlers y relatifs préalablement, le cas échéant.

En somme, c’est Emmanuel Kant, dans sa philosophie pratique axée sur ‘’L’autonomie de l’être humain’’, qui nous apprend que ‘’La vocation de tout être humain est de penser par soi-même, en s’appuyant sur la devise des Lumières se disant : ‘’Aie le courage de te servir de ton propre entendement[32]’’. Donc, la façon de vivre au quotidien met l’avocat professionnel face à toutes les évidences qui sont contraires à l’éthique qu’il doit surmonter pourvu qu’il s’écoute avant qu’il n’agisse professionnellement. En effet, cette marque de grandeur d’âme fera de l’avocat professionnel un nom qui retentit à tout jamais dans le monde de la basoche. Il sera très écouté, apprécié et compris tant aujourd’hui que demain au moyen de ses œuvres qui le porteront au rang des avocats connaisseurs en droit et non de ceux baptisés continuellement ‘’avocaillons.’’

Mais, est-il possible pour l’avocat professionnel d’appliquer la déontologie de son domaine dans un pays comme le nôtre ?


19/11/21 

Delcarme BOLIVARD, Av.

Doctorant en Criminologie

Conseiller à l’OABCH

Responsable de Défense

Communautaire à Kay Dwa/Kay Lwa

Auteur

 

 

 



Bibliographie

 

1-      Code international de l’éthique de l’Association internationale du Barreau, 1988, http://www.ibanet.org/Document/Default.aspx?DocumentUid=A9AB05AA-8B69-4BF2-B52C-97E1CF774A1B, consulté le 10 novembre à 10 hs AM.

2-      Commission internationale des Juristes, 1952, Genève, https://www.icj.org/ , consulté le 14 novembre 2021 à 16 hs.

3-      DAMIEN André. Être Avocat aujourd’hui. APIL VERSAILLESS, S.A IMPRIMERIE CENTRALE DE L’OUEST, page 217.

4-      Déclaration de Genève : respect de la primauté du droit et le rôle des juges et des avocats en temps de crise, Genève 2011. 

5-      Décret du 29 mars 1979 révisant la loi du 06 mai 1932, le décret du 21 janvier 1946, et réglementant, sur de nouvelles bases, l'exercice de la profession d'avocat.

6-      Emmanuel Kant : ‘’Réponse à la question : Qu’est-ce que ‘’les Lumières’’ ?’’, dans la philosophie de l’histoire, Paris, Gauthier, coll. Médiations, 1946.

7-      Fédération des Barreaux d’Haïti (FBH), Code de déontologie de la profession d’avocat, 21 août2002. https://www.barreauportauprince.org/images/Texte%20de%base%20de%20base%20base%20de%20la%20profeession%2adavocat%20en%20Haitipdf, consulté le 12 novembre 2021 à 14 hs.

8-      https://avocats.be/sites/default/files/texte_deontologie.pdf mise à jour le 26 août 2014, consulté le 09 novembre 2021 à 11 hs AM.

9-      https://legalclient.frdeontologie-quelles-sont-les-obligations-auxquels-les-avocats-sont-tenus/ consulté le 08 novembre 2021 à 14 hs.

10-  https://www.asfcanada.ca/uploads/publications/uploaded_guide-juridique-hr-pdf-68.pdf, consulté le 5 novembre 2021, à 18 hs.

11-  MICHEL Matayer : La philosophie éthique : Enjeux et débats actuels, éd., du Renouveau Inc., 2002, Imp. au Canada, page 404.

12-  PIERRE Schallum : Notes de cours d’éléments d’éthique (IST5050), dispensés au programme doctoral à l’ISTEAH, le 11 septembre 2020.

13-  Politiques et initiatives de l’Association du Barreau américain, 21 août 1878, Chicago, Illinois, https://www.americanbar.org/, consulté le 10 novembre 2021 à 18 hs.

7-      Principes de base relatifs au rôle du barreau, adoptés par le huitième Congrès des Nations-Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants qui s'est tenu à la Havane (Cuba) du 27 août au 7 septembre 1990.

8-      Principes internationaux de déontologie de la profession juridique, 28 mai 2011, http://www.ibanet.org/Document/Default.aspx?DocumentUid=F9D51C-DB-4D4D-4258-8098-CD38DE874513, consulté le 15 novembre 2021 à 11 hs MA.

14-  Standards de La Haye sur les standards éthiques des avocats qui comparaissent devant les tribunaux internationaux, 27 septembre 2010, http://www.ucl.ac.uk/laws/cict/docs/Hague_Sept2010.pdf, consulté le 13 novembre 2021 à 9 hs AM.

 

 

Notes de bas de page

[3] Matayer MICHEL : La philosophie éthique : Enjeux et débats actuels, éd., du Renouveau Inc., 2002, Imp. au Canada, p 2

[4] Schallum PIERRE : Notes de cours d’éléments d’éthique (IST5050), dispensés au programme doctoral à l’ISTEAH, le 11 septembre 2020.

 

[6] Ibid.

[12] Ibid.

[14] Décret du 29 mars 1979 révisant la loi du 06 mai 1932, le décret du 21 janvier 1946, et réglementant, sur de nouvelles bases, l'exercice de la profession d'avocat, Art.13.

 

[16] Art. 8 du décret du 29 mars 1979 sur la profession d’avocat en Haïti.

[17] https://avocats.be/sites/default/files/texte_deontologie.pdf mise à jour le 26 août 2014, consulté le 07 novembre 2021 à 16 hs.

[19] Les Principes de base relatifs au rôle du barreau, art. 12.

[20]Ibid. Art. 13-a

[21] Ibid. Art. 13-b

[22] Ibid. Art. 13-c

[23] Ibid. Art. 14

[24] Ibid. Art 15

[25] Code de déontologie de la profession d’avocat, préc. note 3, article 1.4.

[26] Ibid., préc. note 3, articles, 1.2 et 1.7.

[27] Décret du 29 mars 1979 réglementant la profession d’avocat, préc. note 17, article 55.

[30] Principes de base relatifs au rôle du Barreau, préc. note 5, art. 14.

[31] Avocat Sans Frontière (ASF) Loc, Cit

[32] Emmanuel Kant : ‘’Réponse à la question : Qu’est-ce que ‘’les Lumières’’ ?’’, dans la philosophie de l’histoire, Paris, Gauthier, coll. Médiations, 1946, p 46.

 

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